Le témoignage de Sherrie, aidante naturelle
« J’ai promis à ma sœur que je me porterais à la défense des aidants naturels. »
Ma sœur disait souvent : « Pendant plus de 12 ans, aucun médecin ne m’a demandé comment j’allais alors que j’étais aidante naturelle auprès de mon mari. »
Cette affirmation restera à jamais gravée dans ma mémoire.
Pendant des années, ma sœur a toujours affiché une certaine lassitude qui semblait indiquer que les difficultés étaient trop lourdes à supporter. Elle était l’aidante naturelle de son mari, atteint d’une maladie chronique. Bien qu’elle soit restée sa principale source de soutien, leurs vies respectives ont été bouleversées à jamais. Ma sœur a dû gérer les rendez-vous chez les médecins, les urgences, les mises à jour familiales, les recherches sur la maladie chronique, et composer avec les douleurs chroniques ingérables de son mari. Elle menait une vie marquée par l’incertitude et par un sentiment permanent de pesanteur.
Ma sœur a eu du mal à accepter la nouvelle réalité de son couple. Les projets de voyage après la retraite n’étaient plus réalisables, et les activités de la vie quotidienne comme les sorties au restaurant avec des amis ou le visionnage d’un film ensemble étaient désormais impossibles. Bien qu’elle ait essayé de trouver de nouveaux centres d’intérêt, notamment en se joignant à une chorale et en apprenant à jouer d’un instrument, elle ressentait toujours une certaine agitation et de la fatigue.
En 2019, ma sœur a reçu un diagnostic de cancer des glandes surrénales de stade 4. Ayant la conviction que les aidants naturels ne sont pas suffisamment soutenus, elle s’est fixé comme objectif d’écrire un livre pour partager son expérience d’aidante naturelle afin d’aider les autres. Elle était très déterminée à mener à terme son récit, mais sa santé s’est soudainement détériorée. Avant de mourir, elle m’a fait cadeau de ses écrits.
Lorsque je m’assois et que je lis les écrits de ma sœur recueillis sur plusieurs années, certains thèmes communs sautent aux yeux : la peur, la culpabilité, la colère, le sentiment d’être piégé, l’impuissance, l’anxiété, la tristesse, l’imprévisibilité, l’inquiétude, la douleur émotionnelle, l’agitation, le désir d’échapper à cette nouvelle situation et le sentiment de perte de la vie.
J’aurais aimé l’écouter davantage et je lui ai promis d’essayer de me porter à la défense des aidants naturels en son honneur.
Voici la liste de souhaits de ma sœur :
- Les prestataires de soins de santé peuvent demander aux aidants naturels comment ils se sentent et comment ils font face à la situation.
- Les prestataires de soins de santé peuvent offrir des ressources aux personnes aidantes naturelles (p. ex. le site Web de l’OSANO; les aidants naturels sont trop occupés et se sentent bien souvent dépassés pour aller chercher des ressources pour eux-mêmes).
- Parlez régulièrement à d’autres aidants naturels qui comprennent ce que vous vivez et qui peuvent vous donner des conseils ou vous écouter avec compassion.
- Consultez un professionnel de la santé mentale pour obtenir des stratégies permettant de gérer le stress et les émotions liés à ce rôle en constante évolution.
- Demandez à une personne extérieure au cercle des soins immédiats de trouver des moyens de vous aider et d’organiser vos priorités.
- Soyez attentif à votre santé physique et émotionnelle. Si vous avez l’impression que vous en faites trop, c’est probablement le cas. Prenez du temps pour vous, même si ce n’est que pour quelques heures.
- La prestation de soins peut être épuisante; veillez à ne pas vous oublier et à ne pas perdre votre identité.
Ma sœur et moi étions très proches, et je savais qu’elle appréciait mon soutien et mon écoute. Cependant, lorsque je réfléchis à son parcours en tant qu’aidante naturelle, je me rends compte qu’il lui aurait été utile, dès le début, de nouer des liens avec d’autres aidants naturels pour discuter de son stress et de ses inquiétudes face à ses responsabilités. Je crois qu’une approche d’équipe est nécessaire pour traiter le patient tout en reconnaissant les besoins de l’aidant naturel et en le soutenant tout au long du cheminement vers le rétablissement.